Un traceur de caractéristiques de tubes.


Cet appareil permet le tracé automatique sur l'écran d'un oscilloscope des caractéristiques d'un tube électronique. Mieux qu'un lampemètre, qui ne donne qu'une indication au point de repos nominal, le traceur montre sur une même image, l'étendue des caractéristiques au-delà de ce point de repos. Cet appareil ne comporte que des lampes courantes ; il permet de tester toutes les lampes de puissance moyenne utilisées en radio et en télévision. Ses réglages permettent une visualisation dans les meilleures conditions.

Principe d'un traceur de courbes

Plusieurs fonctions permettent de caractériser un tube ; ces fonctions peuvent être représentées par leurs courbes dans un repère donné : la courbe de l'intensité anodique (Ip) en fonction de la tension de grille de commande (G1), pour une tension anodique donnée (Vp), (figure 1202) mais aussi la courbe de l'intensité anodique en fonction de la tension anodique, pour plusieurs tensions de grille données (figure 1203). C'est cette dernière caractéristique que notre traceur va afficher.


(Fig. 1202)



(Fig. 1203)


Comment visualiser à l'écran cette courbe Ip=f(Vp) ?

L'idée est la suivante : on alimente l'anode avec une tension variable, on alimente la grille avec une tension fixe donnée, et on relève point par point, l'intensité anodique lorsque la tension anodique varie. Tout oscilloscope permet le mode XY, c'est ce mode qu'on va utiliser. Dans ce mode, le spot se déplace horizontalement en fonction d'une tension externe (notre Vp) et verticalement en fonction d'une autre tension externe (il va donc falloir convertir notre Ip en une tension qui en sera le reflet, grâce à … une simple résistance) (figure 1204).


(Fig. 1204)


Dans ces conditions, le spot va décrire une courbe, et une seule en partant du coin bas gauche et en allant vers la droite, au fur et à mesure que Vp (sur X) augmente , et vers le haut, au fur et à mesure que Ip (sur Y) augmente. Pour inscrire une courbe en permanence, il va falloir répéter le processus : il faut que lorsque Vp a varié de 0v à une valeur maximale, elle revienne à 0v et recommence à augmenter : il faut donc que Vp soit périodique, de fréquence assez grande pour que l'œil ne s'aperçoive pas du déplacement du spot, et qu'elle varie presque linéairement en fonction du temps (mais pas rigoureusement) afin que la luminosité de la trace soit presque constante (figure 1205).


(Fig. 1205)


Si on s'en tenait à ça, il n'y aurait qu'une courbe, pour une tension VG1 donnée. Pour tracer un réseau complet de courbes, il faut faire varier aussi VG1 ! Comment faire ? Il faut que lorsque Vp varie, VG1 reste constante. Mais lorsque Vp va retourner du maximum à 0V, on va changer VG1. Il faut donc que VG1 présente une forme en marches d'escalier (figure 1206).


(Fig. 1206)


Caractéristiques du traceur

Afin de répondre aux besoins courants en radio et télévision, notre traceur aura les caractéristiques suivantes :


Analyse du synoptique

Le synoptique (figure 1200) montre les fonctions internes du traceur, ainsi que les connexions à effectuer sur le tube à tester et sur l'oscilloscope.


(Fig. 1200)


Un oscillateur pilote de fréquence de l'ordre de 5KHz, fournit les tops de synchronisation aux autres fonctions. Ces tops sont donc espacés de 200µs environ, cette valeur est la durée du tracé d'une courbe dans le réseau.

Un générateur de rampe haute tension produit la tension anodique Vp qui est appliquée sur l'anode du tube à tester. Cette tension a une allure en dent de scie (légèrement exponentielle, toutefois). La tension Vp, trop grande pour l'entrée X de l'oscilloscope est d'abord divisée par 10 avant d'être accessible sur une prise BNC.

Dans le retour de cathode du tube à tester on remarque la résistance R. C'est cette résistance R qui transforme le courant anodique (plus exactement le courant anodique + le courant des grilles écrans, mais l'erreur n'est pas grande) en une tension. Deux valeurs de R sont disponibles : 10 et 100 ohm. Lorsque la résistance 10 ohm est en circuit, un courant de 1mA produira une tension de 10mV sur l'entrée Y de l'oscilloscope, quand la résistance est de 100 ohm, la tension sera de 100mV. Selon la sensibilité de l'entrée Y de l'oscilloscope, on choisira 10 ou 100 ohm. Attention toutefois, lorsque la résistance est de 100 ohm, un courant de 10 mA produit déjà une tension de 1V qui vient s'ajouter à la polarisation, au risque de produire des erreurs sur les courbes. On n'utilisera donc la résistance de 100 ohm que lorsque le courant d'anode sera faible (pour les pentodes HF, par exemple)

Les tops de synchronisation arrivent aussi au générateur de marches d'escalier. Celui-ci est basé sur un générateur de courant qui " pompe " un condensateur uniquement pendant l'état haut de l'horloge (c'est-à-dire 1/5 du temps, 40 µs). Pendant ces 40µs, le condensateur se charge d'une certaine quantité d'électricité, et la tension à ses bornes augmente. Puis pendant le reste du temps, cette tension reste constante, tout le temps que Vp varie. Si on n'avait que ce circuit, la tension aux bornes de ce condensateur atteindrait la valeur de la haute tension, puis n'évoluerait plus.

Un diviseur de fréquence à monostable synchronisé par les tops, permet de décharger le condensateur périodiquement. Cette remise à zéro (RAZ) intervient après un certain nombre de tops, nombre réglable par l'utilisateur. Un circuit de clamping à diode permet de décaler la tension produite afin qu'elle soit négative. VG1 évolue donc de 0v à une valeur négative, par bonds d'amplitude réglable en agissant sur le courant du générateur de courant.

Analyse du schéma (figure 1201)

Cliquez sur le schéma pour l'agrandir)


(Fig. 1201) Schéma


L'oscillateur pilote est formé d'un astable à deux triodes V1a et V1b. La sortie est prise sur l'anode de V1b, une résistance dans le retour de cathode de V1a permet de générer la tension d'effacement (Z).

Le générateur de rampe haute tension est formé de la triode V4a, utilisée en interrupteur commandé. Le condensateur C27 se charge au travers d'une résistance variable (R41..R43 et K1) à partir de la haute tension +B. La charge est exponentielle, mais la limitation de l'amplitude fait qu'elle est presque linéaire. Le top de synchro présent sur la grille de V4a, rend la triode conductrice, C27 se décharge alors dans cette triode et le cycle peut recommencer. La polarisation négative (-C) est nécessaire afin que la tension minimale de sortie Vp soit proche de 0V. La pentode V6, montée en cathode suiveuse (anode au +B) permet d'amplifier l'intensité du courant fourni au tube à tester. Un diviseur de tension par 10 dans sa cathode fournit la tension de balayage horizontal, X.

La triode V4b est un différenciateur afin de fournir des impulsions brèves au monostable formé des triodes V5a et V5b. Celui-ci est réglable en période grâce à P1. La plage de variation de la période permet de générer une impulsion sur l'anode de V5b dont la fréquence est de 2 à 9 fois plus faible que celle du pilote.

Le générateur de marches d'escalier est formé du générateur de courant à pentode V3b. L'intensité du courant est réglable grâce à P2, qui règle la tension d'écran de la pentode, et par là, l'intensité anodique. Lors du top de synchronisation issu du pilote, la pentode est rendu conductrice, le condensateur C22 se charge par le courant anodique de V3b, au travers de la diode V2a. La tension aux bornes de C22 évolue donc dans le sens qui fait diminuer le potentiel sur l'anode de V2a. Initialement à +A, ce potentiel, diminue à chaque top de synchro et tend vers 0v.

Le circuit de RAZ est confié à la triode V3a qui, lors du top issu du monostable, est rendue conductrice : le condensateur C22 se décharge alors rapidement dans cette triode, le potentiel sur l'anode de V2a remonte donc à la valeur +A.

L'ensemble C23, R3 et V2b constitue le circuit de clamping qui fait que la tension VG1 évolue de 0V à une tension négative.

La figure 1207 montre les connexions avec la prise d'alimentation, la prise Din de l'adaptateur ainsi que le générateur de tension d'écran. Celui-ci est formé d'un ensemble de diodes zener dont les valeurs sont choisies en fonction des tensions désirées. Le commutateur K2 permet de choisir la tension d'écran.

(Cliquez sur le schéma pour l'agrandir)


(Fig. 1207)


Le commutateur K2 permet de choisir la résistance de mesure de l'intensité anodique Ip.

Notons le circuit de chauffage des filaments des lampes, ainsi que les découplages d'alimentation.

NOMENCLATURE

Résistances (carbone, 5%, 1/4W sauf indication contraire)

    R1, R2, R3, R4, R5, R38 : 1M
    R6 : 2,2M
    R7, R44 : 10K
    R8 : 470
    R9, R37 : 39K
    R10 : 91K
    R11 : 10
    R12 : 100
    R16, R17, R18, R19, R21, R39 : 47K
    R20 : 100K
    R34 : 22K
    R35 : 2,2K
    R36 : 680K
    R40 : 12K
    R41 : 2x330K en parallèle
    R42 : 2x150K en parallèle
    R43 : 2x270K en parallèle
    R45 : 4,7K 2W

Condensateurs

    C13, C24 : 22p/250v
    C14 : 22nF/63v
    C15, C22, C23, C28, C29, C32 : 100nF/400v
    C25 : 100p/250v
    C26 : 47n/400v
    C27 : 1n/1600v
    C30, C31 : 12n/400v
    C33 : 10p/63v
    C50 : 220n/400v
    C51 : 10µ/100v

Diodes

    D46, D47, D48 : BZX55C51V
    D49 : 2xBZX55C36V en série

Tubes

    V1, V4, V5 : ECC82 / 12AU7
    V2 : EB91 / 6AL5
    V3 : ECF80 / 6BL8
    V6 : EL84 / 6BQ5

Divers

    K1 : commutateur 1 circuit 3 positions
    K2 : commutateur 1 circuit 5 positions
    K3 : commutateur 1 circuit 2 positions
    J1 : prise Din 5 broches 180°
    J2 : prise sub-D femelle 25 points
    P1, P2 : 150K ou 220K loi A


Construction du traceur

Le traceur peut être construit sur un châssis en volant, ou bien sur circuit imprimé. Les fréquences basses utilisées n'obligent pas à prendre des précautions particulières, autres que le bon sens, pour le câblage. Le châssis peut être en tôle, mais on peut aussi avantageusement utiliser de l'époxy cuivré qui se travaille très facilement, se soude encore plus facilement et donne des résultats esthétiques satisfaisants tout en gardant une rigidité mécanique correcte.

Voici la marche à suivre dans le cas de l'utilisation d'époxy.

Quelque soit le matériau utilisé pour le châssis, le peindre si nécessaire et monter les supports sur la plaque supérieure, les prises, les commutateurs et les potentiomètres sur la face avant, la prise d'alimentation sur la face arrière. Puis effectuer le câblage en respectant l'ordre suivant afin de faciliter le montage :



Quelques photos de la maquette (cliquez pour les agrandir)













































Vérifications et réglages

Avant la mise sous tension, vérifier attentivement le câblage pour éviter toute mauvaise connexion et tout court-circuit ! Si tout est correct, on réglera l'alimentation aux valeurs de tensions nominales (-75v, +250v et +620v) : les points à vérifier sont les suivants :


Lorsque ces vérifications sont faites, il ne reste plus qu'à faire le marquage de la face avant. Pour les potentiomètres, il s'agit d'étalonner leur cadran. Pour cela, visualiser la tension VG1 sur un oscilloscope, en mode normal (Y=f(t)) ; Pour ce qui est de P2, rien de plus simple : il suffit de faire des repères correspondant au nombre de marches du signal VG1. Pour P1, on fera des repères correspondant aux hauteurs de marche de 1, 2, 3 et 4 volts.

Le reste du marquage consiste à indiquer les repères pour les commutateurs, ainsi que les dénominations des prises.

La photographie (photo1) donne un aperçu de ces marquages.


(Fig. photo1)


Confection des adaptateurs

Elle ne présente aucune difficulté. Chaque adaptateur pourra être dédié à un type de culot. On pourra réaliser des adaptateurs à douilles bananes + straps, ou, si le nombre de combinaisons est restreint, on pourra utiliser un commutateur permettant de passer d'un type de brochage à un autre.

Ces adaptateurs comporteront donc un support de tube, un système de matriçage des combinaisons, un cordon muni d'une fiche Din qu'on branchera sur la prise du boîtier.

On pourra, bien sûr, confectionner un adaptateur " rapide " avec un support de lampe sur lequel on soudera les 5 fils provenant de la fiche Din, dans le cas où on voudrait ne tester qu'un type de tube. (figure 1209)


(Fig. 1209)


Alimentations requises

Il est préférable d'utiliser une alimentation régulée pour le +250v (+A), prévoir environ 25 mA. L'alimentation +620v (+B) pourra n'être que filtrée, mais si possible variable. On pourra l'ajuster au vu de l'amplitude horizontale des tracés : si celle-ci est trop faible, il conviendra d'augmenter légèrement la tension +B, si au contraire, l'amplitude horizontale est trop forte, il conviendra de baisser la tension +B. L'intensité à fournir par cette tension +B variera en fonction du tube à tester. Pour de simples tubes de signal, prévoir 20mA. Dès qu'on testera des tubes de puissance, l'intensité pourra atteindre plusieurs dizaines de milliampères.

La tension de polarisation négative de -75v (-C) devra être si possible régulée.

L'alimentation devra délivrer aussi la tension de chauffage pour le tube à tester. Il est préférable de prévoir plusieurs tensions alternatives différentes, et quelques tensions continues afin de pouvoir tester le plus de tubes possibles (secteur, batteries, tous courants …) . Cette tension de chauffage sera totalement isolée du reste de l'alimentation, en effet le pôle repéré " F-" est relié dans le traceur à la borne K/F-, c'est-à-dire au point chaud de la résistance R de mesure de Ip. Mettre ce pôle à la masse par l'alimentation empêcherait toute mesure de Ip !

Dans un premier temps, on pourra se contenter d'alimentations simples, non régulées, mais le fonctionnement risque d'en être affecté. La double alimentation HT décrite dans la même rubrique a été étudiée justement pour ce traceur.

Et maintenant, place aux tests des tubes !…

Pour s'entraîner, il est conseillé de tester un tube qui ne risque rien ! Une ECC82 fera parfaitement l'affaire. De plus, sa tension de chauffage de 6,3v est standard. Lorsqu'on sera plus familiarisé avec l'appareil, on pourra se lancer dans le test des vieilles triodes batteries…

Attention toutefois aux erreurs de câblage : Vp appliquée sur la grille à la place de VG1 et c'est la mort assurée !

Voici, dans l'ordre la marche à suivre pour le test d'un tube :